Trois heures du matin. L'heure de l'insomnie.
S'étaler en travers de son matelas humide, et tenter de trouver la position adéquate, se désarticulant de toutes les façons possibles et imaginables. Pousser sur le côté son oreiller brûlant, puis revenir y enfouir son visage pâle et pourtant fiévreux.
Attendre le sommeil, qui ne viendrait jamais.

Perle roula sur elle-même deux fois, et s'écrasa face contre terre. Elle resta là, perdue, semi-consciente ; trop fatiguée pour bouger mais pas assez pour s'endormir. Un gémissement s'échappa de ses lèvres tremblantes. Il lui semblait que sa tête s'emplissait de plomb en fusion ; et que quelque force démoniaque plantait ses griffes acérées dans ses globes oculaires, pour les lui arracher.
Elle redressa le buste, et se tint sur ses bras crispés par la douleur ; alors qu'elle cherchait du regard la petite boîte nacrée qui contenait ses antidouleur, à travers sa frange de jais qui lui collait au front, une goutte de sueur glacée glissa le long de sa colonne vertébrale. La demoiselle fut parcourue d'un spasme soudain, et ses membres grelottants se dérobèrent sous elle ; son crâne heurta violemment le pied de son lit d'hôtel. Et ce fut le noir complet.


-Funécire ? Funé ?? ….... CIIIIIIIIIIIIRE !!!

Perle ouvrit enfin les yeux, et leva une main en direction de son starter. Elle lui caressa doucement la tête, signe que tout allait -plus ou moins- bien. Hamlet se rapprocha du visage de sa dresseuse en sautillant, et se frotta contre sa joue maintenant glacée. La jeune fille s'assit et rejeta sa longue chevelure sombre en arrière ; sa boîte crânienne lui semblait excessivement lourde ; mais au moins elle ne souffrait plus. Pour le moment.
L'adolescente se leva précautionneusement, et prit le temps de respirer un grand coup avant de se diriger vers la baignoire. En passant, elle jeta un coup d’œil à sa montre : dix heures et cinq minutes. Si elle se préparait rapidement, elle serait à Primepoc dans les temps.

Après s'être douchée et avoir revêtu sa plus belle tenue -gardant tout de même à l'esprit qu'elle devait rester sobre : elle allait visiter son nouvel établissement, pas défiler sur le tapis rouge- Perle contacta la réception de l'hôtel de Pom'Depik, et se fit apporter un copieux petit-déjeuner, qu'elle partagea avec Hamlet, que le fait de s'empiffrer de macarons et de toasts grillés ravit au plus haut point.

-Sommes-nous fin prêts, camarade ? Fit la demoiselle en parant son pokemon d'un magnifique nœud papillon de couleur parme.

-Funé ! Approuva ce dernier.

Rassemblant ses volumineux bagages (à savoir deux gigantesques valises, un sac de voyage, un sac à dos, un baluchon et une sacoche...), la frêle adolescente se précipita dans l’ascenseur, et environ dix minutes après avoir fait appeler un taxi, la voilà partie, en compagnie de son Funécire.
Le chauffeur lui annonça qu'une vingtaine de minutes les séparait de l'académie ; mais que si la nouvelle élève avait décidé de s'y rendre à pieds, le trajet aurait été deux fois plus long. Et à la perspective de quarante minutes de marche en traînant ses affaires à la force de ses bras minces, Perle frissonna d'horreur.
Elle vit son minuscule ami plaquer sa bouille blanche contre la vitre, et, regardant le paysage à travers cette dernière, la jeune fille aperçut un  Doudouvet et un Chlorobule chahutant dans l'herbe, verte malgré les petites touches de neige poudreuse qui la parsemaient.
La demoiselle s'était perdue dans son observation béate de cet environnement nouveau qui serait maintenant le sien, lorsque la voiture s'arrêta. Le chauffeur tourna la tête vers Perle et lui signala qu'elle était arrivée à destination ; l'adolescente le remercia poliment, le paya -sans oublier de lui laisser un gracieux pourboire- puis descendit du véhicule, Hamlet sur son épaule gauche.

Une demi-heure plus tard, la jeune fille se retrouvait face à la porte de sa nouvelle résidence.
Elle sortait d'un entretien avec un Miaouss parlant qui lui avait attribué une «maison » à qui elle devrait faire gagner des « points » grâce à un dur labeur quotidien. Perle n'en revenait pas, et le temps nécessaire à l'assimilation de ces informations, elle avait monté ses bagages jusqu'au deuxième étage, apparemment réservé aux membres de la maison Minspic, dont elle faisait maintenant partie. Les bras et les jambes en compote, pleine d'appréhension pour cette vie différente de ce qu'elle avait connu, qui commençait, elle finit par ouvrir la porte de la chambre trois.

Elle vit un lit sous une fenêtre, et décréta que ce serait le sien. Si l'adolescente avait besoin de quelque chose dans la vie, c'était un carré de ciel bleu.
Usant une dernière fois de ses membres ankylosés, Perle plaça ses affaires juste devant sa couche, dégageant ainsi le passage. Ceci fait, elle déplia son uniforme neuf, fouilla dans son sac à dos, en sortit son carnet de croquis et sa trousse, puis se tourna vers son starter qui la regardait faire, du haut d'une valise :

-A ton avis, comment pourrais-je rendre ce triste habit réglementaire plus à mon goût ? Lui demanda t-elle, pensive.