Alexia n'était pas arrivée en retard, ce qui était une première pour elle. Le cours de survie, et le directeur ainsi que son infâme secrétaire avaient été clairs là-dessus, était un cours essentiel. Le professeur Grimm, dont elle ne savait pas grand chose en dehors du fait qu'il était possiblement borgne et sévère, faisait un discours histoire de chauffer les esprits de ses élèves et les introduire à sa matière, en appuyant sur le fait qu'il était important de savoir survivre seul en pleine nature. Elle soupira ; elle devait avouer qu'elle ne s'attendait pas à avoir une telle matière et elle n'en voyait pas réellement l'utilité. Car selon elle, tant que l'on possédait des pokémon avec soi, il n'était pas vraiment possible de mourir dans la nature si on était malin. Si on l'était, parce que bon nombre d'élèves dans cette pièce n'avait pas l'air de l'être, entre celui qui se gavait en cours, celle qui se repoudrait le nez et certains qui dormaient, ça faisait une belle brochette de winners. La brune eut un sourire.

Elle avait le sentiment que ce prof était un peu en train de perdre son temps. Certains savaient déjà s'en sortir, avec ou sans leurs pokémons. D'autres comptaient beaucoup sur ces derniers et elle en faisait un peu partie, après tout les pokémons servaient aussi à nous faciliter la vie, en dehors de se taper dessus. Et puis, Mr. Grimm parla de vouloir entretenir une certaine rivalité entre ses élèves, comme si il n'y en avait pas déjà comme ça avec les différentes maisons et le système de points qui pouvait pénaliser n'importe qui à la moindre incartade. Encore un soupir de sa part. Elle eut un air un peu plus désintéressé lorsqu'il parla de déterrer des objets et d'en garder un en tant que trophée, même si cela pouvait s'avérer intéressant, ce n'était pas comme ça qu'il devrait procéder pour obliger ses élèves à se démener encore plus dans ses cours. Par contre, elle devait avouer que la partie pratique était alléchante, car ce n'était que dans ces moments-là que l'on voyait qui était malin ou non. Bref, pour l'instant c'était la théorie et le professeur, n'ayant pas préparé de leçons, posa deux questions simples qui retentirent dans l'esprit de la Minspic. Qu'est-ce que la survie pour vous ? En quoi pensez-vous que ce cours peut être utile ? D'un air las, Alexia leva sa main dans le but de transmettre ses réponses.

- Je pense que pour survivre il ne faut jamais abandonner, sinon c'est la fin, même lorsque notre état physique nous permet de continuer, tout est dans l'esprit. Je ne sais pas si ce cours me sera utile, mais je sais que si je devais me débrouiller seule, sans mes pokémons, je ferais du mieux que je peux malgré mes lacunes en la matière. Donc j'imagine que oui, cette matière va m'apporter quelque chose, je n'ai pas envie de perdre mon temps non plus.

Un jour, quelqu'un lui a dit: "Quand tu ne sais plus faire quelque chose, enseigne-le". Depuis cet instant, il a toujours eu une vision particulière des professeurs qu'il côtoyait, se demandant si leur profession n'était que le résultat de la résignation face à ce qu'ils ne savaient plus faire. Il espérait que non, ça donnerait un côté beaucoup trop triste à la chose. Adam se tenait dans la classe, la tête supportée par son bras, fatigué du manque de sommeil qu'il emmagasinait depuis quelques jours. S'il ne semblait pas présent physiquement, il l'était pourtant mentalement, écoutant le professeur donner ses premières directives. Le cours ne l'enchantait pas plus qu'il ne lui déplaisait; il attendrait de voir lui-même ce qu'il avait à offrir. Déjà, les travaux pratiques impliquaient du camping sauvage. Ajoutez à ça quelques personnes pas trop chiantes, ça fait des bons moments en perspective.

Il ne savait rien des rumeurs à propos de ce professeur et ça ne l'intéressait pas vraiment. Qu'il fasse partie d'une secte de cosplay de pirate ou qu'il cache des substances illicites dans son trou d'oeil, ça le concernait lui et lui seul. Par contre, Adam tiqua face à une réplique de ce dernier. "  Sachez simplement qu'il ne me plaît pas plus à moi qu'à vous d'être ici aujourd'hui". Est-ce qu'il était sérieux, là? C'était quoi cette attitude de merde? À part pour paraître cool devant une bande de jeunes qui avaient sûrement mordu à l'hameçon, il ne voyait pas l'intérêt de dire ça. Il soupira avant de se permettre un commentaire, à voix basse.

"Si t'as pas envie d'être ici fallait choisir un autre métier..."

Au moins, il n'en ressortirait pas les mains vides, de ce cours. Un cherch'objet, c'est toujours cool à utiliser. De quoi titiller son envie de performer, aussi. Il ignora les autres élèves pointés du doigt par le prof, aucun intérêt. Néanmoins, il porta attention au discours de chacun. C'était quoi, la survie, pour eux? C'était quoi pour lui, en fait? À bien y penser, il ne le savait pas trop lui-même. Si bien que lorsque son tour arriva, il n'avait aucune idée de quoi répondre.

"Euh, la survie c'est quelque chose. Qui existe depuis toujours..."

Au diable le truc raisonnable, allons-y avec la première idée qui lui est venue en tête.

"La survie c'est le privilège des forts. C'est un combat qui se fait toujours, sans cesse, autant dans l'académie que dans la forêt, peu importe où. C'est ce qui sépare les meneurs et ceux qui suivent, ceux à la surface et ceux qui ont la tête sous l'eau. C'est ce qui démarque l'élite de la plèbe. La survie, ça sert à montrer qui est assez fort pour ne pas se faire écraser sous le poids de la compétition. C'est ce que je pense."

C'était un coup direct à ce système de maisons et de mentalités étranges qui rôdaient. Chaque maison faisait preuve d'élitisme déjà les cours à peine commencés, ça n'augurait rien de bon pour la suite.

Jace était en retard, pour changer. N’étant pas de nature particulièrement ponctuelle, il était relativement courant qu’il soit en retard ici et là. Mais un cours où personne n’avait envie d’arriver après le début de la leçon, c’était très certainement celui de survie. Déjà, le prof était complètement sadique et bizarre, mais évidemment, il se donnerait à coeur joie de coller quiconque dérangerait son cours d’une manière ou d’une autre. Et Jace ne mourrait pas spécialement d’envie de se faire coller, ou même de se faire remarquer durant le cours du vieux Grimm. Aussi prit-il la peine d’écouter à travers la porte pour voir ce qu’il se passait à l’intérieur des murs, le temps de quelques secondes pour comprendre que Grimm demandait aux élèves ce qu’ils pensaient de la survie, et ce qu’évoquait ce mot pour eux.

Bon, au moins, il savait ce qu’il fallait faire pour le cours. Maintenant, le tout était de rentrer dans la salle sans pour autant éveiller une quelconque colère chez le professeur, qu’il puisse repartir en paix après le cours et vivre sa vie tranquillement.

Il entra le plus discrètement possible, ne faisant étonnement aucun bruit — ce qui n’était pas son fort habituellement, et se faufila jusqu’à une place libre, faisant une chorégraphie tout à fait grotesque pour parvenir à la place visée tout en étant le plus invisible possible. Les élèves ne semblaient pas l’avoir remarqué, en même temps, il était à moitié en train de ramper, mais Grimm l’avait vu, lui, et tous deux le savaient pertinemment.

Enfin arrivé à sa place, il attendit que l’élève qui était en train de prendre la parole pour expliquer son point de vue aie fini pour lui même prendre la parole avant que le professeur puisse décider de le considérer.

« La survie, pour moi, c’est un peu ce qui vient de se passer sous nos yeux, du moins, dans ce contexte présent. Vous avez un prédateur, qui, pour moi, était votre personne, et l’objectif numéro un, c’est d’arriver à vivre avec, ou plutôt d’y survivre, comme le nom l’indique. Pour le moment, je ne m’en sors pas trop mal.

Et ce que j’attends de ce cours, c’est que vous m’appreniez à faire la même chose en dehors de ces murs, j’imagine. »

Il dévisagea le professeur un instant avant de se rasseoir confortablement, enfin débarrassé de toutes ces fioritures. Il ne prit pas une énorme attention au reste du cours, mais ne quitta pas le professeur des yeux, cet homme d’une trentaine d’années qui jaugeait tous les élèves un à un. Il se demanda pourquoi est-ce que le directeur avait pu engager un homme qui, selon les rumeurs, était si cruel avec ses propres élèves, entre autres.

La tête soutenue par la paume de sa main, l’adolescent écoutait les piailleries aux alentours d’un air absent. Pourtant il y était attentif et sous ses airs blasés, il se concentrait pour trouver une conversation digne d’intérêt. Hélas, rien. Jusqu’à ce que le professeur Grimm, personnage inconnu aux yeux du garçon, ne pénètre dans la salle pour y faire régner un semblant de silence.
Stan avait trouvé un certain intérêt pour le personnage. Il était curieux, mais son discours n’était pas un de ces monologues prémâchés et plein d’espoirs supposés chauffer l’auditoire. Il était direct et d’une franchise presque admirable. Même si l’adolescent aurait juré entendre quelques personnes se plaindre à cet instant, il avait apprécié.
Enfin un enseignant qui ne prétend pas aimer son travail et ses élèves. C’est agréable.

Finalement le professeur avait décidé de passer dans les rangs pour donner la parole à chacun des élèves. Stanley avait quelques instants pensé à se dissimuler sur sa chaise, pas vraiment désireux de débattre sur ce point-là ni de parler devant une foule de gens. D'ailleurs les divers avis avaient parfois des points intéressants, si on oubliait les enfonçages de portes ouvertes et les points nakama power.
Et finalement le moment tant redouté arriva et le jeune homme se retrouva confronté à la même question que ses camarades.

« Bah. Commença-t-il d’un air quelque peu hébété, hésitant à s’attirer les foudres de l’auditoire en exprimant le fond de la pensée. Tout d’abord je pense que ceux qui ne sont pas capable de survivre en pleine nature n’ont strictement rien à faire ici. Il balaya la salle du regard. Sauf s’ils aspirent à rester cloîtrer dans l’académie et devenir prof. Comme vous. »

Stan avait au moins le mérite d’être d’une honnêteté affligeante. Mais il savait aussi qu’il n’avait pas répondu à la question. Pas pour l’instant, du moins.

« La survie, ça se définit selon le lieu où on se trouve. Il y a survivre dans une forêt hostile, dans un désert aride ou même dans une salle de classe. Si j’avais le malheur d’offenser quelqu’un de violent ici-même, je serai très certainement en situation de survie mais ce serait diffèrent que de survivre dans un milieu sauvage. Il marqua un silence. C’est le principe de rester en vie. La sélection naturelle fait le reste, tout le monde ici n’est pas destiné à réussir. Mais vous pouvez en aider quelques-uns à tenir plus longtemps, à la limite. »

Il passa le reste de l’heure à somnoler, n’offrant un peu de son intérêt que lorsque le professeur prenait la parole. Il n’avait entendu que des rumeurs à son sujet (et dieu sait qu’il n’écoutait pas les rumeurs) mais cette première impression était plutôt positive et il tenait à savoir qui espérait lui apprendre les ficelles de la survie.